Focus à partir d’un échantillon de communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes
Quelles sont les tendances pour les villes petites et moyennes en 2024, après plusieurs années de crises (Covid-19, crises énergétique et inflationniste, etc.) ? Les politiques culturelles y apparaissent-elles plus fragilisées que dans les plus grandes polarités urbaines ?
Un des volets du baromètre apporte des éléments de réponse. Il cible des communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants qui remplissent une certaine fonction de centralité sur leur territoire. Les résultats présentés reposent sur les données déclarées de ces communes L’enquête a été menée par questionnaire (via emailing et campagne téléphonique auprès des directeurs et directrices des affaires culturelles prioritairement) d’avril à juin 2024. Avec 22 questionnaires collectés sur 32 communes ciblées, le taux de réponse avoisine les 69 %. L’échantillon comprend des communes dont la population varie entre 1 611 et 43 210 habitants. La moyenne démographique s’établit à 16 836 habitants, et la médiane à 13 359 habitants. en matière d’évolution des budgets primitifs et de positionnement culturel. Ils restituent également des éléments de conjoncture. Ce volet régionalisé permet de disposer d’informations sur une catégorie de villes que l’enquête nationale ne couvre pas L’échantillon national est constitué de : 13 régions ; 68 départements ; 73 communes de plus de 50 000 habitants, dont 23 communes de plus de 100 000 habitants et 50 communes de 50 000 à 100 000 habitants ; 45 intercommunalités comprenant une ville de plus de 50 000 habitants ; 2 collectivités d’Outre-mer et une collectivité à statut particulier située en Outre-mer. Les communes de plus de 50 000 habitants d’Auvergne-Rhône-Alpes sont concernées par le volet national du baromètre..
1. Évolutions des budgets primitifs, des emplois culturels et des subventions des communes préfectures et sous-préfectures d’AURA de moins de 50 000 habitants
Ce qu’il faut retenir : au regard des évolutions déclarées entre 2023 et 2024 et dans la continuité des tendances observées sur la période précédente (2022-2023), la situation budgétaire des communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants est un peu moins favorable que celle des villes de plus de 50 000 habitants de l’échantillon national du baromètre. Les budgets primitifs culturels de fonctionnement (hors masse salariale) des villes petites et moyennes sont moins souvent en hausse entre 2023 et 2024 qu’entre 2022 et 2023. Leur situation apparaît toutefois légèrement moins contrainte en 2024 si on examine l’évolution des budgets primitifs culturels d’investissement.

La stabilité (ou évolution inférieure à 1 %) est majoritaire en ce qui concerne les budgets primitifs culturels de fonctionnement (hors masse salariale). Elle s’est nettement renforcée par rapport à l’enquête précédente (55 % de répondants contre 44 %). Les déclarations de diminutions et d’augmentations budgétaires sont en recul : 32 % déclarent une baisse budgétaire entre 2023 et 2024 contre 40 % entre 2022 et 2023 ; seuls 14 % des répondants auralpins indiquent une augmentation cette année contre 17 % sur la période antérieure. Moins de 10 % des communes de l’échantillon déclarent augmenter leur budget culturel de fonctionnement dans des proportions égales ou supérieures au taux d’inflation 2023 (+4,9 %).
Par ailleurs, les hausses déclarées de budgets culturels de fonctionnement sont moins fréquentes que celles des budgets primitifs totaux (non uniquement culture) votés par les communes entre 2023 et 2024 (14 % contre 27 %).
Le situation apparaît ainsi plus défavorable en 2024 pour les villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes que pour les collectivités de l’échantillon national du baromètre.

Paradoxalement, les tendances d’évolution des budgets de fonctionnement (hors masse salariale) par domaines de politique culturelle entre 2023 et 2024 sont un peu moins pessimistes que les données budgétaires globales déclarées. Cette différence s’explique en partie par un nombre de réponses « non concerné » en forte augmentation en 2024 pour plusieurs domaines.
La tendance générale est à la stabilité. Les baisses déclarées sont moins nombreuses que sur la période 2022-2023. Ces dernières touchent cette année plus le spectacle vivant que les autres domaines. Le spectacle vivant est également le domaine dans lequel on trouve le plus d’augmentations, avec les archives et le soutien aux festivals/événements.
Comme dans le baromètre auralpin 2023, pour deux domaines – livre et lecture, création plastique et visuelle – aucune commune n’a déclaré de hausse en fonctionnement cette année.

L’évolution des budgets primitifs culturels d’investissement entre 2023 et 2024 est plus favorable que dans le baromètre 2023. 38 % déclarent une hausse cette année contre 24 % pour la période 2022-2023. 29 % indiquent une baisse cette année contre 42 % des répondants pour la période précédente. Près d’un tiers des répondants déclarent une stabilité de leur budget culturel d’investissement.

L’évolution du nombre d’emplois culturels entre 2023 et 2024 s’inscrit dans la lignée des tendances observées entre 2022 et 2023. Elle est stable pour plus de 70 % des communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants et en hausse pour 18 % d’entre elles.

La stabilité domine également pour ce qui est des subventions versées aux associations culturelles entre 2023 et 2024 par les communes de l’échantillon (71 %). Deux communes de l’échantillon déclarent une baisse ; deux autres une hausse alors qu’aucune n’en déclarait sur la période antérieure. Si la situation en matière de soutien aux associations culturelles semble s’être légèrement améliorée en 2024 pour les villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes, elle reste toutefois moins bonne que celle des communes de plus de 50 000 habitants de l’échantillon national du baromètre.
2. Positionnement des communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants en matière culturelle
Ce qu’il faut retenir : l’action publique des communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants reste structurée par les logiques d’accès, mais on note une percée du registre de la démocratie culturelle. Les déclarations des directeurs et directrices des affaires culturelles (DAC) font état d’une érosion de l’importance politique accordée à l’action publique culturelle. Par ailleurs, la situation de la coopération multiniveaux en matière culturelle est perçue moins favorablement pour ces villes petites et moyennes que pour les grandes villes du volet national (communes de plus de 50 000 habitants). La dynamique intercommunale y apparaît également affaiblie.
a/ Orientations de politique culturelle

Comment les directeurs et directrices des affaires culturelles des villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes perçoivent-ils la place donnée à la politique culturelle ? Près de 70 % des DAC indiquent que la politique culturelle est autant une priorité qu’avant pour leur commune. 18 % estiment que celle-ci l’est davantage qu’auparavant ; ils étaient deux fois plus nombreux à le déclarer dans le baromètre 2023. Deux répondants considèrent par ailleurs que la politique culturelle est moins une priorité qu’avant, alors qu’aucun ne déclarait de retrait en 2023. Les données de l’échantillon national du baromètre 2024 indiquent également une certaine forme de dépriorisation de la politique culturelle du point de vue des DAC.

Le baromètre permet d’interroger les collectivités sur les objectifs politiques qui orientent en priorité les choix culturels de leur exécutif. Leurs réponses – demandées sous forme de trois mots-clés – sont représentées sur le nuage de mots. L’occurrence la plus fréquente pour les villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes est celle de l’accessibilité – comme en 2023 – devant celle de la diversité, en nette progression.
Pour faciliter la lecture et atténuer les effets liés à la pluralité des termes utilisés pour qualifier un même type de positionnement culturel, une thématisation en 14 registres d’action a été élaborée à partir des objectifs politiques qui orientent en priorité les choix des exécutifs des collectivités répondantes. Chaque thème inclut une série de mots-clés Cette typologie a été élaborée à partir des données du volet national du baromètre., dont voici les principaux exemples :
- Accès : accessibilité/accès (pour tous), culture pour tous, démocratisation, médiation, publics…
- Création artistique : création, soutien aux artistes, présence artistique…
- Démocratie culturelle : diversité, participation, droits culturels…
- Domaines culturels : patrimoine, lecture publique, arts plastiques, numérique, industries culturelles…
- Éducation/jeunesse : jeunesse, éducation, EAC, jeune public…
- Gouvernance/coopération : partenariats, coopération, mutualisation, réseaux, concertation…
- Impact social : lien social, inclusion, vivre ensemble, mixité, solidarité, cohésion, émancipation…
- Ingénierie : accompagnement, structuration, ingénierie…
- Logiques économiques : budget, modèle économique, économies budgétaires…
- Logiques territoriales : territoire, attractivité, rayonnement, équité, proximité, ancrage territorial, maillage, identité, ruralité, aménagement…
- Offre : diffusion, équipements, événementiel, qualité, exigence, lisibilité…
- Principes d’action publique : continuité, efficacité, innovation, pluridisciplinarité…
- Transitions : transition, environnement…
- Divers : cette catégorie correspond à plusieurs terminologies générales qui ne rentrent pas dans les catégories précédentes.

Les registres de la gouvernance-coopération, de l’ingénierie et des transitions ne sont pas mobilisés par les communes préfectures et sous-préfectures d’Auvergne-Rhône-Alpes de moins de 50 000 habitants. Les logiques d’accès et d’offre structurent en priorité leur action politique en matière de culture, comme en 2023, avec le registre de la démocratie culturelle, qui a nettement progressé par rapport au baromètre antérieur. Les logiques territoriales sont mobilisées dans des proportions assez proches de celles des grandes villes du volet national (communes de plus de 50 000 habitants).

Le baromètre 2024 a également abordé le sujet du soutien aux pratiques artistiques en amateur au cours des deux dernières années : 59 % des communes indiquent un maintien de leur effort dans ce domaine, 14 % un renforcement et 18 % un affaiblissement. Le retrait est plus marqué dans notre échantillon de villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes que dans l’échantillon des communes de plus de 50 000 habitants du volet national du baromètre.

La manière dont les collectivités conditionnent (ou non) certaines de leurs aides financières apporte des informations complémentaires sur la conduite de l’action publique et sa (re)politisation à partir de critères exogènes. En 2024, moins de 30 % des communes indiquent une absence de critères de conditionnalité ; cette proportion est – comme dans le volet national du baromètre – en légère augmentation cette année Plutôt que de parler de « conditionnalité » pour certaines modalités, des répondants considèrent qu’il s’agit d’éléments d’appréciation ou d’une attention portée à certaines dimensions.. Pour les DAC qui déclarent la prise en compte de critères, la préférence pour les fournisseurs locaux a nettement progressé par rapport au baromètre 2023, devant la promotion de la diversité culturelle qui apparaît, elle, en diminution. Comme dans les résultats de l’enquête antérieure, le critère d’égalité entre femmes et hommes est en retrait dans les villes petites et moyennes (alors qu’il est plus souvent mobilisé dans les plus grandes villes) et une proportion toujours significative de DAC n’est pas en mesure de répondre à la question des conditionnalités.
b/ Dynamique intercommunale et coopération publique

55 % des DAC considèrent que la dynamique intercommunale en matière culturelle s’est maintenue à un même niveau d’intensité sur leur territoire en 2023-2024 (contre 58 % dans l’enquête précédente). 23 % jugent qu’elle s’est renforcée (contre 32 %) et 18 % qu’elle s’est affaiblie (contre 5 %).

L’enquête aborde la manière dont les DAC perçoivent, pour leur commune, la coopération multiniveaux en matière de politique culturelle :
- une grande majorité de DAC considèrent que la coopération n’a pas évolué avec l’État (82 % contre 71 % dans l’enquête antérieure) et avec les autres niveaux de collectivités (62 % contre 59 % dans l’enquête antérieure) ;
- la proportion de DAC qui considèrent que la coopération avec l’État s’est accrue – en baisse significative par rapport à l’enquête 2023 – est identique à celle qui estime qu’elle a diminué : 5 % ;
- la configuration est proche en 2024 pour ce qui est de la coopération avec les autres niveaux de collectivités territoriales : ils sont 14 % de répondants à considérer qu’elle s’est accrue (contre 24 % en 2023) et autant à considérer qu’elle est en retrait.
La situation de la coopération multiniveaux en matière culturelle est perçue globalement comme moins favorable pour les villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes que pour les grandes villes du volet national.

23 % des répondants indiquent être en recherche d’une plus grande autonomie dans la conduite de leur politique culturelle par rapport à celle de l’État et par rapport à celle des autres niveaux de collectivités territoriales. 45 % indiquent le contraire, ce qui, dans un contexte budgétaire contraint, peut correspondre au souhait d’un maintien des partenariats en cours et des logiques de solidarité financière.
Enfin, un DAC sur trois indique ne pas être en mesure de renseigner la question sur une éventuelle recherche d’autonomie, ce qui manifeste une forme d’incertitude quant aux positionnements politiques en matière de partenariat public.
3. Focus sur la transition écologique et sur les entraves à la liberté de création/diffusion artistique et les atteintes matérielles contre des œuvres ou des équipements culturels
Ce qu’il faut retenir : l’édition 2024 du baromètre a permis d’approfondir les problématiques de transition écologique dans le secteur public de la culture et d’aborder de nouvelles questions conjoncturelles autour des formes de pressions qui impactent la liberté de création/diffusion artistique ainsi que des atteintes matérielles aux biens culturels.

Les DAC ont d’abord été interrogés sur l’importance accordée à la transition écologique dans la politique culturelle de leur collectivité, sur une échelle de 0 (inexistante) à 5 (très importante). Avec une moyenne de 2, sa place est perçue moins prioritaire au sein des villes petites et moyennes d’Auvergne-Rhône-Alpes qu’au sein des communes de plus de 50 000 habitants de l’échantillon national du baromètre (moyenne de 3).

Il a également été demandé aux responsables culturels quelles démarches ont été mises en place par leur service en faveur de la transition écologique. Près d’un tiers indiquent ne pas avoir engagé d’action spécifique. Pour les communes qui en déclarent, les mesures de sobriété énergétique (équipements culturels, adaptation du patrimoine…) sont les plus citées (plus de la moitié des 22 répondants), devant les actions de mutualisation de matériel.


Enfin, le baromètre 2024 a porté un regard sur les problématiques d’entraves à la liberté de création/diffusion artistique et d’atteintes matérielles contre des œuvres ou des équipements culturels pris pour cible, alors que ces sujets ont été relativement médiatisés au cours de l’année écoulée.
Une très grande majorité de responsables culturels (plus de 90 %) indiquent ne pas constater ces phénomènes en 2023-2024 sur leur territoire. Pour seulement 5 % des communes répondantes, ils sont jugés en augmentation. Les atteintes matérielles aux biens culturels (tags sur des monuments…) semblent moins concerner les villes petites et moyennes auralpines que les grandes villes de l’échantillon national du baromètre.